Manifeste pour une justice climatique féministe

8 mars 2024

Aujourd’hui plus que jamais, nous vivons des moments de grandes incertitudes pour l’avenir de l’humanité et du vivant. Mais nous croyons en la possibilité d’un monde différent où le soin des personnes et de la nature serait au centre des préoccupations et au cœur des priorités politiques. Une société où l’on sortirait du productivisme pour mettre la reproductibilité du vivant au cœur de l’économie. 

Pour y arriver, nous refusons le système de développement globalisé actuel qui allie croissance économique, extractivisme, patriarcat et néocolonialisme.  

Nous dénonçons un régime qui détruit l’environnement, une politique qui induit des mécanismes de prédation des territoires et se nourrit des violences sur la nature et les corps des femmes.  Les crises sanitaires, les guerres déclarées (ou non), expriment l’ampleur actuelle d’un système qui conduit à l’extrême concentration des richesses et du pouvoir, à la destruction et au mépris de toutes les formes de vie, aux inégalités et à la violence. 

Ces dernières années, nous avons échangé sur les imaginaires écoféministes d’Afrique de l’Ouest, d’Amérique centrale, d’Amérique du sud et d’Europe. Ce qui nous a permis d’imaginer les modalités d’une écologie politique féministe et de :  

  • Réfléchir aux dominations structurelles  
  • Comprendre comment l’idéologie patriarcale peut se recycler sous des formes subtiles
  • Penser des alternatives dépatriarcalisées 
  • Débattre de la destruction des espaces de vie et de la biodiversité 
  • Repenser la souveraineté alimentaire, et ce plus particulièrement en temps de guerre 
  • Sensibiliser sur les conséquences du commerce international sur les paysannes des Suds 
  • Laisser une place au soin de soi, des autres et de la nature 
  • Redonner du pouvoir à nos corps, le Reclaim 

Nous souhaitons ainsi réaffirmer les 10 principes suivants :  

  1. Nous appelons les puissances mondiales et les gouvernements à garantir les Droits humains, les Droits sexuels et reproductifs et les Droits de la Nature, qui sont indissociables.  
  2. Nous convions nos gouvernements à mettre en application des politiques qui légifèrent l’exploitation minière, la déforestation et la violence sexuelle liées à ces exploitations ; c’est à dire qui assume les responsabilités sociales, environnementales et fiscales.  Et à soutenir les luttes de femmes pour la reconnaissance et la protection des territoires des peuples et communautés originaires. 
  3. Nous soutenons l’annulation de la dette des pays les plus pauvres mais également les dettes individuelles et illégitimes qui mettent en lumière les mécanismes de domination et d’exploitation. Les inévitables impositions du FMI et de la BM, implique l’érosion de la souveraineté alimentaire, l’impossibilité de projets autonomes, la précarité du travail, la perte de droits à l’éducation, au logement, à la santé et à une vie décente. 
  4. Nous affirmons que le « care étendu au vivant » (soin à la vie et à la nature) doit être au centre de l’économie et devenir une priorité politique. Nous voulons une vie qui ait du sens, qui crée des liens entre tous les êtres vivants et leurs permettent une vie digne ; ce que certains.es appellent « le buen vivir ».  
  5. Nous demandons aux États d’appuyer politiquement et financièrement les alternatives économiques résilientes qui persistent et résistent face à la prépondérance de l’économie de marché ; les économies paysannes et indigènes, les dynamiques agroécologiques, et toutes les formes économiques qui privilégient les soins, le travail, la vie, souvent pris en charge par des femmes. 
  6. Nous soulignons l’importance stratégique de soutenir les productions locales notamment les productions agroécologiques, et ce partout dans le Monde, en Europe et en Belgique.  Une agriculture moins dépendante des intrants externes que sont les engrais et pesticides, avec des circuits courts de commercialisation et un mode de production résilient au climat.  
  7. Nous exhortons l’État belge à une politique d’accueil digne et respectueuse des conventions internationales en matière d’asile et leurs droits humains et à reconnaitre les différents motifs qui poussent à la migration. Nous appelons aussi le milieu associatif et les différentes institutions à reconnaitre les besoins spécifiques de femmes migrantes et de valoriser leur expertise. 
  8. Nous appelons à assumer des moyens non violents pour résoudre les conflits armés, à partir de l’éthique et de l’expérience féministe, en mettant au premier plan la vie, le bien commun, la solidarité, la consolidation de la paix avec la justice. Nous persisterons dans nos luttes pour une vie sans violence pour nous-mêmes et pour le monde, par des initiatives à tous niveaux, locaux, nationaux, mondiaux, par des dynamiques d’adelphité et de solidarité, interpellant les mouvements sociaux et la société dans son ensemble.   
  9. Nous sommes solidaires des femmes dans les zones de conflits armés, dans les régions sinistrées ou connaissant des situations insécuritaires. Nous soutenons celles qui souffrent des politiques religieuses extrémistes et des violences institutionnelles dans tous les coins du globe ; nous sommes avec toutes les femmes qui se battent et résistent. 
  10. Nous affirmons notre volonté de tisser des alliances fortes, de travailler ensemble sans hiérarchies, avec des femmes et des hommes pour favoriser une polyphonie écoféministe vers un autre monde qui ne peut plus attendre.

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